Le blog de Joseph Savès
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La monnaie unique en question

Comment la monnaie unique tue l'Europe

3 - Une solution : la monnaie commune


Introduite en 1999 par le traité de Maastricht, la monnaie unique, on l'a vu, répond à un objectif politique et idéologique davantage qu'à une nécessité économique. Elle a été installée en faisant fi des disparités économiques et des particularités nationales, en particulier dans le rapport au travail et la gestion des solidarités.

Du coup, n’étant plus protégées par l’arme de la dévaluation, les économies les moins agressives (essentiellement le sud de l'Europe) succombent sous le poids toujours croissant des exportations allemandes. Elles perdent peu à peu leurs capacités de production et menacent d’entraîner tout le continent dans leur ruine.

Les dirigeants européens s’obstinent néanmoins à préserver la monnaie unique, fut-ce en violant le suffrage universel et la souveraineté des États :
- Le traité constitutionnel a été appliqué en dépit de son franc rejet par les Français et les Hollandais, en 2005.
- La Grèce, Chypre et le Portugal ont été placés sous le protectorat d’une « troïka ».
- Les élus français (droite et gauche réunies) se sont départis de leur principal pouvoir en accordant à Bruxelles le contrôle des recettes et des dépenses publiques sans pour autant l'assortir d'une solidarité interétatique (note). C'est le bâton sans la carotte...

Las, près de dix ans après la « crise des subprimes », le spectre de la déflation menace pour de bon la zone euro et en particulier les pays de la façade méditerranéenne ( note).

Pour circonscrire cette menace, le gouverneur de la BCE Mario Draghi a défié en mai 2014 l'orthodoxie libérale en baissant ses taux d'intérêt au maximum avec l'espoir de relancer le crédit, l'investissement et la consommation. À l'automne 2014, il a doublé la mise en annonçant le rachat de dettes souveraines par la BCE (note).

Dans les pays du Sud, le crédit bon marché ne suffit pas à rendre aux patrons le goût d'entreprendre. Du fait de la baisse de la demande, leur outil de production est désormais surdimensionné. Ils ne voient pas quel investissement pourrait corriger leurs handicaps structurels et relancer leurs ventes sur les marchés domestiques et extérieurs. Bien sûr, il en irait autrement avec une dévaluation qui permettrait aux industriels, aux agriculteurs et aux professionnels du tourisme de retrouver de l'attractivité et de reprendre leur souffle !...

Plus inattendue est la conséquence outre-Rhin de la baisse des taux d'intérêt : les épargnants allemands qui avaient beaucoup misé sur les obligations et l'assurance-vie craignent de voir leurs revenus s'effondrer. Ils commencent de reporter leur épargne vers l'immobilier, ce qui occasionne une augmentation des prix des logements et des loyers, au détriment des classes moyennes.

Qui plus est, les industriels allemands commencent à pâtir de l'appauvrissement des pays du Sud, avec une baisse des commandes et de l'activité. Ils découvrent la perversité des échanges dissymétriques, avec des ventes à crédit qui s'effondrent dès lors que les débiteurs cessent d'être solvables. Sans doute ne tarderont-ils pas à regretter des échanges symétriques et loyaux fondés sur la réciprocité !

Ainsi l'Allemagne qui croyait pouvoir tirer profit de la monnaie unique risque-t-elle d'en être à son tour victime, tant il est vrai qu'un système mauvais par nature ne peut générer que des inconvénients.

Une catastrophe majeure se profile, avec son lot de ruines, de jacqueries et qui sait ? de guerres civiles, sociales ou ethniques. Elle nourrira les réflexions des historiens du futur sur l’inconscience abyssale des Européens de ce début du XXIe siècle. Y aurait-il moyen de l’éviter ?

Une issue brutale : la sortie de l'euro

La manière la plus évidente d'échapper au piège de la monnaie unique est d'en sortir, soit que tous les États de la zone euro s'accordent sur le retour à la case départ et rétablissent leur monnaie nationale, soit que les États les plus fragiles (Chypre, Grèce, Portugal...) en soient exclus l'un après l'autre.

Les partisans de la monnaie unique, confrontés à son échec, se retranchent derrière une ultime ligne de défense : « S'il est vrai que l'euro n'a amené que des déconvenues, en sortir serait bien pire, avec le retour à l'inflation, une dette astronomique, la fermeture des frontières etc etc ! » Ils assènent cet argument ambigu avec la même assurance qu'ils mettaient à énoncer, il y a quinze ans, les bienfaits de la monnaie unique (note).

On peut légitimement mettre en doute leurs prédictions mais on ne peut faire fi d'une conséquence certaine de la fin de l'euro : il s'ensuivrait dans tous les cas un détricotage de la construction européenne, laquelle ne tient plus que par la monnaie.

En effet, depuis que la finance a pris le pas sur l'industrie dans les années 1980, aucun projet mobilisateur n'est venu relayer les grands projets antérieurs (politique agricole commune, Arianespace, Airbus). D'autre part, le Royaume-Uni, principal pays demeuré à l'écart de la zone euro, a peu à peu pris le large tout en se rapprochant des États-Unis. Le Brexit de 2016 a confirmé sa rupture, ce qui a affaibli considérablement le poids politique de l'Union européenne.

Mais à vrai dire, sauf catastrophe ou révolution, la fin de l'euro est improbable à moyen terme.

Chypre, la Grèce, le Portugal ou encore l'Espagne, qui auraient les meilleures raisons de quitter la zone euro, n'en ont aucune envie pour des motifs essentiellement politiques. Ces pays ont vécu dans la pauvreté, l'asservissement ou la dictature jusqu'à une date récente. Ils ont perçu leur accession à l'Union européenne et à la zone euro comme un brevet de modernité.

Ils craignent de retourner dans l'ombre et, de toute façon, avec la fuite à l'étranger de leurs jeunes élites, ils ont perdu les ressorts qui leur permettraient d'affronter seuls les défis planétaires à venir. Par ailleurs, leur oligarchie a un intérêt personnel à la conservation de l'euro : sécurité des placements financiers, exportation aisée des capitaux, optimisation fiscale, facilités de déplacement...

Aussi n'est-il pas exclu que la monnaie unique perdure vaille que vaille, fut-ce au prix de la ruine du Vieux Continent et du retour des pays méditerranéens à la pauvreté qui était la leur il y a une centaine d'années (note).

Une issue élégante : la monnaie « commune »

Nous avons montré en introduction de ce dossier comment la monnaie unique divise les Européens :
- sous-évalué par rapport au potentiel industriel de l'Allemagne et sur-évalué par rapport aux pays du sud (Italie du nord exceptée), l'euro déséquilibre leurs échanges dans des dimensions jamais vues (en 2016, l'excédent commercial de l'Allemagne a atteint 9% de son PIB !),
- les faibles taux d'intérêt dûs à la confiance placée par les banques dans la puissance allemande encouragent les États les plus fragiles à s'endetter outre-mesure et financer de la sorte leurs déficits commerciaux.

À ces défauts structurels, les dirigeants tentent de répondre par des politiques de « rigueur » qui ne résolvent rien. Il s'agit aujourd'hui d'éviter l'appauvrissement sans fin de nos pays aussi bien qu'une rupture de l'Union européenne, qui serait catastrophique.

Nous soumettons à votre réflexion une solution propre à réconcilier les citoyens européens avec l’Union et avec l'euro.

Il s'agit de transformer la monnaie « unique » en une monnaie « commune », en réintroduisant des monnaies nationales (drachme, franc, mark...) adossées à cette monnaie commune. Cette solution a été envisagée par les Britanniques lors du débat sur la monnaie européenne mais trop vite écartée par les Allemands et les Français.

Cette monnaie « commune » tient en deux points :

1- La monnaie commune (continuons de l'appeler euro) se présente comme une monnaie complémentaire des monnaies nationales. Elle est réservée aux transactions extra-européennes (importations de marchandises chinoises ou de pétrole moyen-oriental). Son taux de change par rapport aux devises étrangères (dollars, yens, roupies, livres, renminbi...) dépend des échanges commerciaux entre l'Europe et le reste du monde. Notons qu'elle n'existe que sous forme scripturale. Ni pièces, ni billets.

Étant associée à des États européens comme l'Allemagne, dont l'économie est parmi les plus solides de la planète, la monnaie commune est à l'abri d'éventuelles attaques de spéculateurs et sûre d'être respectée par les interlocuteurs financiers de Londres, New York, Shanghai ou Tokyo.

2- Chaque pays utilise par ailleurs sa monnaie nationale, mais seulement pour les usages domestiques et les échanges avec le reste de la zone monétaire européenne. Au départ, les monnaies nationales s'échangent avec l'euro au taux de un pour un. Elles sont ensuite réévaluées les unes par rapport aux autres suivant l'évolution des échanges intra-européens (note).

Précisons tout cela :

- Une monnaie commune à usage international et des monnaies à usage européen

La monnaie commune induit un système monétaire à deux étages, avec une « lubrification » qui prévient de façon naturelle les à-coups :

1- la Banque Centrale Européenne gère les émissions en euros et les conversions entre euros et devises étrangères.

2- les Banques nationales gèrent les émissions dans leur monnaie et les conversions dans une autre devise européenne ou en euros.

Par exemple, un Français ayant vendu des parfums aux États-Unis convertit ses dollars en francs auprès de la Banque de France. Celle-ci, à son tour, remet les dollars à la Banque Centrale Européenne et obtient en contrepartie des francs.

La BCE échange ses devises étrangères contre les euros disponibles sur les marchés internationaux. Comme à l'accoutumée, le taux de change entre l'euro et les devises étrangères s'établit normalement sur la base des quantités disponibles : en simplifiant, disons que si les banques américaines proposent dix milliards d'euros à la BCE et celle-ci quinze milliards de dollars aux banques américaines, on aura un taux de change d'un dollar et demi pour un euro.

Maintenant, si un Allemand vend des voitures en France, il reçoit des francs et les convertit contre des marks auprès de la Banque d'Allemagne. À son tour, la Banque d'Allemagne convertit ses francs en marks auprès de la BCE.

Enfin, si un importateur français veut acheter des télévisions au Japon, il donne à la Banque de France les francs dont il dispose et celle-ci les convertit auprès de la BCE en euros dont l'importateur va se servir pour ses achats au Japon.

3- la BCE sert de chambre de compensation entre les différentes monnaies européennes - c'est sa deuxième fonction -.

Si, sur la base des taux en vigueur, la BCE a reçu de la Banque de France moins de monnaies européennes ou étrangères qu'elle n'a reçu des francs de l'ensemble des autres banques, c'est le signe d'un solde commercial négatif de la France. Dans ces conditions, soit la Banque de France demande un crédit en considérant que ce déficit est accidentel et pourra être facilement résorbé, soit on réajuste à la baisse la part du franc dans le « panier » européen ; c'est une dévaluation.

Des monnaies qui « flottent », c'est naturel

La classe politique européenne a instillé la peur des « manipulations monétaires » pour justifier la monnaie unique... et les fructueux placements financiers qu'ils en attendent. Rien n'est plus absurde que cette peur.

Lorsqu'il s'agit de rééquilibrer le solde commercial d'un pays, la dévaluation est un remède « naturel » beaucoup moins douloureux que l'austérité imposée (baisse des salaires du secteur productif) et autrement plus efficace car elle s'applique de façon invisible et indolore à tous les revenus, y compris les salaires des cadres et des fonctionnaires, les honoraires, les loyers et les dividendes.

La dévaluation ne change rien aux transactions intérieures, qui concernent la grande majorité de l’activité. Elle a pour seul effet visible d’augmenter le prix des achats à l’étranger, au demeurant dans une proportion réduite. Ainsi, le prix du carburant automobile, produit sensible entre tous, est à plus de 60% constitué par les taxes intérieures, le coût du raffinage et de la distribution ; l’incidence d’une dévaluation reste dans ce cas assez faible et peut être facilement compensée par une légère diminution des taxes intérieures.

Notons enfin que, si les ajustements monétaires sont aujourd'hui interdits entre « partenaires » européens du fait de la monnaie unique, ils perdurent bel et bien entre la zone euro et le reste du monde. L'euro « flotte » en permanence par rapport au dollar ou au yen. Il se dévalue ou se réévalue sans que personne s'en émeuve ou tente de s'y opposer. Ce régime des « changes flottants » agit comme une force de rappel dans le sens d'un rééquilibrage des échanges commerciaux de la zone euro avec le reste du monde. Et c'est heureux.

- Une Europe à l'abri de la spéculation et des déséquilibres commerciaux

La monnaie commune est un dispositif intermédiaire entre le Système monétaire européen (SME) mis en place en 1979 et la monnaie unique qui lui a succédé.

Le SME avait introduit une monnaie de compte commune, l'ECU, conçue comme un « panier » des monnaies nationales. Mais il souffrait de ce que les monnaies nationales qui le constituaient ne pouvaient fluctuer entre elles que dans de strictes limites et qu'elles pouvaient donner lieu à des transactions sur toutes les places financières de la planète.

Un spéculateur américain pouvait ainsi spéculer sur une monnaie réputée faible par des ventes à terme : par exemple, il s'engageait à vendre des lires italiennes contre des dollars mais demandait à ne procéder à l'échange que dans un mois ; sa démarche affolait les marchés et précipitait la chute de la lire de sorte que le moment venu, il pouvait acheter au comptant des lires à bas prix et, comme il s'y était engagé, les revendait contre des dollars au cours du mois précédent en réalisant ainsi un bénéfice substantiel !

- La monnaie commune a un premier avantage : à la différence du SME, elle réserve en effet les monnaies nationales aux échanges à l'intérieur de la zone monétaire européenne. Indisponibles sur les places financières internationales, à Londres, Tokyo ou New York, ces monnaies se trouvent de ce fait à l'abri d'éventuelles attaques spéculatives.

- L'avantage décisif de la monnaie commune par rapport à la monnaie unique est d'autoriser les réajustements monétaires entre États européens, en cas de déséquilibre flagrant des échanges :

Supposons que la balance commerciale d'un pays vienne à se dégrader brutalement comme c'est le cas aujourd'hui en France ou en Grèce : le pays va demander un réajustement de son taux de change par rapport à la monnaie commune. De la sorte, il va pouvoir relancer en douceur ses exportations et réduire ses importations.

Appliquée à la Grèce, cette solution lui eut permis de rétablir à bon compte sa compétitivité touristique et agricole par rapport à ses concurrents extra-européens (Turquie, Tunisie...). Appliquée à la France, elle eut évité à son industrie que de simples erreurs de management s'avèrent mortelles face au rouleau-compresseur allemand.

Notons que la monnaie commune, en garantissant l'équilibre des échanges, supprime la tentation protectionniste avec des campagnes du type « Achetez français ». Pareilles campagnes n'ont plus lieu d'être. Pas plus d'ailleurs que la réintroduction de droits de douane à la frontière !

- Une Europe « unie dans la diversité »

Pour les citoyens ordinaires, la monnaie commune a l'inconvénient, notons-le, de réintroduire le change des pièces et des billets entre les pays européens pour les petits achats hors de chez soi ; cet inconvénient mineur doit être rapporté à l'inconvénient majeur de la monnaie unique : ruine des États méditerranéens, désindustrialisation et chômage de masse... Refuse-t-on un médicament sous prétexte qu'il a mauvais goût ?

Il n'est pas trop tard pour mettre en œuvre la monnaie commune. Cette solution inédite reflète à merveille dans le domaine monétaire la belle devise de l'Union européenne : « Unie dans la diversité »... Elle offre l'avantage d'une monnaie forte sur la scène planétaire, avec des taux d'intérêt avantageux, tout en respectant les différences entre les sociétés de notre cher Vieux Continent.

Mais qui saura se détacher des idées convenues, porter les yeux sur elle et arrêter la course à l'abîme ?

Les pays du Sud - et l'Irlande -, on l'a vu, n'ont ni la volonté ni la stature qui leur permettraient d'imposer une réforme de l'Europe et de sa monnaie. Seule la France, forte de son potentiel économique, de sa relative jeunesse, de son Histoire et de sa culture démocratique et révolutionnaire, en est encore capable.

Pour le dire clairement, l'Union européenne s'accommoderait très bien de la sortie de la Grèce ou du Portugal mais ne survivrait pas à celle de la France. Osons donc le mot : c’est d’un gouvernement de salut public (Clemenceau 1917 ou de Gaulle 1958) énergique et visionnaire, capable d'imposer son choix aux autres gouvernants, que sortira notre salut et celui de l’Europe.

Mais le temps presse. Dans quelques années, les chances de rebond de notre pays auront été réduites à néant par la ruine de son industrie et l’exil de ses jeunes diplômés. Faute d’avoir agi quand il était encore temps, nous devrons alors nous résigner à devenir les DOM-TOM d’une Europe continentale centrée sur l’Allemagne, autrement dit un territoire sous perfusion, soumis au bon vouloir de sa métropole (note).

Monnaie commune, mode d'emploi

Le passage de la monnaie unique à la monnaie commune apparaît bien plus simple et moins coûteux que les bricolages financiers par lesquels, depuis six ou sept ans, on tente de sauver la monnaie unique :

1- Dans un premier temps, les responsables européens proclament haut et fort leur volonté de défendre coûte que coûte la monnaie unique... afin d'endormir la méfiance des marchés.

2- Ensuite, à la faveur d'un long week-end ensoleillé durant lequel tout le monde (ou presque) est parti en villégiature, ils suspendent les transactions en euros.

3- Ils décrètent la conversion par les banques des montants en euros qu'elles détiennent dans la nouvelle monnaie nationale au taux de 1 pour 1 (1 drachme = 1 franc = 1 mark = ... = 1 euro). Rien de plus simple : il s'agit d'un jeu d'écriture informatique quasi-instantané.

4- Les agences bancaires apposent sur les billets de banque qui passent en leur possession un tampon à l'effigie de la nouvelle monnaie nationale : il ne s'agit que d'un détail car la monnaie fiduciaire (billets de banque et pièces de monnaie) représente moins de 5% de la masse monétaire totale, très loin derrière la monnaie scripturale (comptes en banque).

5- Important : les dettes en euros sont elles-mêmes converties dans la nouvelle monnaie nationale du débiteur, à moins qu'elles aient été contractées sous un régime étranger, ce qui demeure peu fréquent dans les contrats étatiques. C'est, en drachmes par exemple, que la Grèce est invitée à rembourser ses précédents emprunts en euros.

L'argument est d'une logique juridique imparable :

Quand ils ont prêté à la Grèce, les créanciers ont-ils obtenu l'assurance formelle que l'Europe garantirait le remboursement de leurs prêts ? En aucune façon. Dès lors que l'Union européenne et la BCE ont refusé par avance d'endosser les risques liés à la dette grecque, on est en droit de considérer celle-ci comme strictement liée à la Grèce, à son économie et à sa monnaie, qu'elle s'appelle euro ou drachme. Si la monnaie grecque est dévaluée, c'est tant pis pour les créanciers étrangers qui, en bons capitalistes, doivent assumer les risques de leurs placements et payer leurs erreurs de jugement.

Le rattachement de la dette à la monnaie nationale n'est pas seulement une mesure de bon sens. C'est aussi une mesure salutaire car elle intéresse les créanciers au redressement du pays. Ils ont tout intérêt en effet à ce que la monnaie soit dévaluée a minima et se redresse au plus vite (ce serait tout le contraire si leurs prêts restaient rattachés à l'euro).

6- Il ne reste plus à la Banque Centrale Européenne qu'à réévaluer le taux des nouvelles monnaies nationales par rapport à l'euro commun, avec, par exemple une dévaluation de 40% de la drachme, une dévaluation de 15% du franc et une réévaluation de 15% du mark. De quoi redresser immédiatement l'activité touristique et agricole de la Grèce ou la production industrielle de la France.

Les Allemands et les petits et gros épargnants de la planète n'auront pas à en souffrir dans leur vie quotidienne ; ils seront simplement conduits à moins épargner et accepter de moindres rendements sur leurs placements. Y sont-ils prêts ? Oserons-nous les y contraindre ? C'est toute la question.

Joseph Savès

Publié ou mis à jour le : 2019-09-20 11:05:18