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Le dossier d'nosutopies.fr

Démographie africaine

Il leur « faut » le planning familial


Cette phrase sort immédiatement dès qu'est évoquée l'exception africaine en matière de fécondité. Une phrase lourde de sous-entendus et de refoulé. Elle suggère que les Africains ont une fécondité exubérante malgré eux, par ignorance du planning familial.

Nous savons heureusement ce qui leur manque parce que nous sommes intelligents, modernes, civilisés. Eux sont de grands enfants, ni intelligents, ni modernes, ni civilisés. On l'aura compris, cette phrase ci-dessus révèle chez son locuteur une condescendance raciste à l'égard des Africains. Conscient ou inconscient, c'est un racisme bien réel.

Ce n'est pas tout. Dire qu'il « faut » aux Africains le planning familial suggère que celui-ci doit leur être imposé. De quelle façon sinon par une pression forte sur les gouvernants. De qui pourrait venir cette pression sinon de nous, les civilisés ! Cela s'appelle bien évidemment du colonialisme. Nous sommes en plein dans le discours de Jules Ferry : « les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures ».

Pour résoudre le dilemme, il faut s'appliquer à comprendre le pourquoi des choses. Les Africains, qui ne bénéficient d'aucun État-Providence, voient dans une progéniture nombreuse le seul recours viable face aux aléas de la vie. Quand on est très pauvre mais que l'on vit sur un territoire encore peu dense, les enfants ne sont pas une charge mais un atout. Sitôt autonomes, ils peuvent participer aux activités de production et aider leurs parents. Face à l'adversité, ils se tiennent les coudes. Et, qui sait ? à l'âge adulte, il peut s'en trouver un qui réussira à émigrer en Europe et fera le bonheur de son clan.

A contrario, dans les villages et les quartiers africains, les femmes stériles sont maudites, exclues de la communauté, parfois vouées à la prostitution. Et si une famille s'avise de n'avoir que deux enfants, elle sera marginalisée et ses enfants incapables de se défendre face aux autres fratries.

Adama Traoré, égérie de la gauche multiculturaliste française, est née dans une famille malienne polygame très nombreuse installée sur le territoire national. Elle-même bénéficie de droit de la citoyenneté française mais n'en fait pas moins l'apologie de la famille polygame, de la solidarité et de la vitalité qui imprègne la fratrie, de la protection qu'elle apporte aux uns et aux autres face au monde extérieur. Ce discours s'entend dès lors que l'État-Providence se défait et se relâche.

Qu'y répondre et que répondre aux Africains qui ont fait le choix de l'hyperfécondité ? La réponse relève de nos propres choix et de l'exemple que nous pouvons offrir. Nous pouvons montrer qu'une société solidaire, fondée sur la confiance mutuelle mais aussi sur l'autorité et le respect de l'intérêt général, peut être une alternative viable à l'esprit de clan. Mais cela reviendrait à rebâtir un État-Nation et un État-Providence, toutes choses que la bienséance néolibérale, libertaire, multiculturaliste et européiste tiennent en horreur...

En même temps, il faudrait pleinement respecter l'autonomie des États africains et par exemple renoncer à les aider financièrement (sauf en cas de catastrophe naturelle) afin qu'ils découvrent par eux-mêmes leur propre voie. Y sommes-nous prêts? C'est une autre affaire.

Publié ou mis à jour le : 2022-01-23 07:46:51